RAPPORT AU SAVOIR ET SAVOIRS EN ACTE : la représentation du savoir par l'apprenant est-elle importante en formation ?

 


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PEDAGOGIES, APPRENTISSAGES, APPRENANTS

La formation va démarrer, formateur et participants commencent à faire connaissance. Une nouvelle relation va naître. Un des paramètres du bon ou du mauvais démarrage de la formation est aussi un des paramètres de l'apprentissage par l'apprenant : quel est son rapport au savoir ? Quelle représentation le stagiaire se fait-il de la formation ? Que vaut le "savoir" à ses yeux ? Quel rapport entretient-il avec le savoir ?

Alors oui, d’expérience, de nombreuses personnes viennent en formation en gardant à l’esprit quelques mauvais passages de leur vécu scolaire, de la notation, ou quelques échecs. La représentation du savoir et de la formation n'est pas toujours très positive.

 

Motivation de l'apprenant, envie d'apprendre et rapport au savoir sont-ils liés ?

La motivation de l'apprenant peut, tout d'abord, être étroitement liée à son rapport au savoir : s'il a une représentation positive du savoir, il sera engagé, et dans l'engagement, l'apprentissage pourra être favorisé ; s'il a une représentation négative du savoir, l'envie d'apprendre risque d'être d'autant diminuée, créant ainsi un obstable ou un frein à l'apprentissage.

Ainsi, lorsque le formateur démarre une formation, le rapport plus ou moins positif - ou plus ou moins négatif - au savoir de l'apprenant pourra dépendre de plusieurs données :

- tout d'abord, le rapport au savoir passé : la représentation négative du savoir peut souvent être due à un passé "douloureux" en termes d'apprentissage, des méthodes pédagogiques qui n'ont pas convenu à l'apprenant, souvent imposées, une mauvaise relation à un enseignant ou à un formateur ; à l'inverse, l'apprenant peut aussi garder de bons souvenirs de son parcours scolaire, de son parcours de formation, d'une apprentissage car il en a retiré une situation ou des moments de plaisir.

- ensuite, le rapport à certains savoirs ou à certaines disciplines : certains domaines rebutent d'emblée, d'autres peuvent aussi créer des blocages individuels directs... N'avez-vous pas identifié vous-même un domaine qui vous rebute, une discipline que vous n'aimez pas trop d'emblée ? Les mathématiques souvent, le Droit aussi...

Ainsi, lorsque j'effectuais régulièrement des formations en Droit, la plupart des professionnels dans la salle arrivaient avec une représentation carrément négative des formations juridiques... je pouvais entendre "On va être saoulés d'articles de lois ! On va rien comprendre au jargon juridique ! Quant à ce qu'on va pouvoir en faire après !"... et je pouvais même lire sur le visage de certains "Allez, 2 jours de perdus !". Et effectivement, quand je commençais à interroger les personnes sur leurs représentations du Droit, croyez bien qu'en récoltant tous ces témoignages, j'aurais pu écrire un bel ouvrage !

- enfin, le rapport inné ou non inné au savoir : car c'est ainsi, certains individus sont parfois avides d'apprendre, de comprendre, de manière innée (certains ont parfois même dans une "boulimie de savoirs"), alors que l'activité d'apprentissage en rebutera d'autres car il s'agit par nature d'une activité qui ne convient pas ou ne plait pas. Nous n'avons pas tous le même rapport au savoir.

 

Anous tous le même rapport au savoir ?

Pour nous aider à répondre en partie à cette question, Claudie Solar décrit 5 postures en fonction des attitudes adoptées par les adultes envers la connaissance, la vérité et l'autorité.

-"Le silence du savoir" : l'adulte ne s'exprime pas ou très peu en formation, ou en situation de travail, et adopte une posture de retrait. Cette personne se met au service de l'autorité et le savoir est conçu comme une autorité.

-"Le savoir des autres" : le savoir fait aussi figure d'autorité, il s'agit de l'intégrer sans juger, le savoir est vrai ou faux, il ne s'agit pas de le comprendre, il faut intégrer des connaissances.

-"Le savoir subjectif" : il n'existe que le savoir personnel. La savoir externe est décrédibilisé, voire contesté. 

-"Le savoir procédural" : dans ce cadre, l'adulte s'engage dans des procédures pour produire de nouvelles connaissances.

-"Le savoir intégré" : dans cette posture, l'adulte intègre l'aspect relatif du savoir, il est toujours en questionnement, en recherche de nouveaux savoirs, en le reliant à partir de sa propre expérience.

Ces différentes formes de rapport au savoir influent en formation les dynamiques de groupe, mettant parfois le formateur en difficulté ou en situation de danger.

 

En cas de difficultés de l'apprenant dans son rapport au savoir, quelles manifestations en formation (ou en classe) ?

Quand l'adulte possède un rapport difficile au savoir ou négatif au savoir, cela se traduit inéluctablement sur son comportement. Plusieurs manifestations sont envisageables, elles sont souvent complexes à appréhender pour le formateur. En voici quelques-unes : 

 LE REFUS D’APPRENDRE : le formateur se retrouve face à des appreNONts (article les Apprenonts de Jacques Rodet) et souvent face à des silences : l'énergie déployée par le formateur peut souvent être énorme au prix d'un trés timide résultat, cela peut également concerner un enseignant.

L’AGRESSIVITE : l'insulte, la provocation de l'apprenant sont les principales manifestations de l'agressivité de l'apprenant et tenter de gagner la confiance d'un apprenant, en pareille circonstance, est un périlleux exercice ; le regard des autres apprenants sur cette stratégie déterminera aussi la suite de la dynamique de groupe. Cet exercice est également difficile pour l'enseignant qui pourra choisir alors un appui individualisé.

Mais peut-on inverser ces manifestations ? Peut-on agir sur l'individu ? .. afin que le rapport au savoir s'inverse pour faire émerger plus tard des savoirs en actes.

 

Peut-on inverser le rapport au savoir "négatif" ?

Il paraît difficile d'inverser le rapport au savoir négatif chez un apprenant, voire quasi-impossible car l'on touche à des données extrêment subjectives et personnelles.

Certaines pistes peuvent être tentées :

- Déterminer les causes du rapport négatif au savoir : en entamant un dialogue avec l'apprenant sur son passé en formation, il est parfois possible que l'on détermine la cause de son dégoût de l'apprentissage. Si cette dernière est clairement identifiée, "passer un contrat" avec l'apprenant sur une méthode pédagogique, une façon d'apprendre peut permettre de rétablir une situation positive (pour reprendre la suite de la situation décrite ci-dessus, il m'arrivait parfois dans une formation juridique, de m'engager par exemple, au minimum, à faire en sorte qu'aucun des stagiaires ne prenne un cachet d'aspirine d'ici la fin de la journée ! avec pour objectif : ne pas "saouler", pour reprendre la formule de certains d'entre eux).

-Tenter de créer l'envie d'apprendre : une manière de démarrer une formation pourra consister à créer l'envie d'apprendre ou à redonner l'envie d'apprendre (voir l'article pour retour PedagoForm "Pédagogie, l'art de donner l'envie d'apprendre"), même si ce moyen comporte une limite : l'individu, que l'on ne peut contraindre en situation de formation professionnelle.

Dans cette approche, il est envisagé de valoriser les savoirs déjà acquis par l'apprenant en lui permettant de prendre consience que dans sa vie, il a appris, notamment par d'autres voies que l'école ou la formation continue. Beaucoup d'individus ignorent qu'ils ont acquis des savoirs tout au long de leur vie, autrement que par la voie scolaire ou estudiantine : ils ont appris à conduire une voiture, une moto ; ils ont appris à faire la cuisine ; ils ont appris à faire du bricolage (et souvent même dans une situation de contrainte !). Beaucoup de personnes ignorent qu'elles ont acquis des savoirs et qu'elles ont des savoirs faire, des savoirs être. En les cherchant avec les apprenants, il peut être noué une discussion sur notre rapport au savoir et pour certaines personnes, cette valorisation des savoirs qu'elle a déjà en elle, peut lui permettre de saisir qu'elle est tout à fait en capacité d'en acquérir de nouveaux... le début du chemin de la représentation un peu plus positive du Savoir vers l'autre chemin des futurs savoirs en actes.

Peut-être avez-vous d'autres idées ? 

 

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